Par une froide journée
d'hiver, un troupeau de hérissons s'était mis en groupe serré pour se protéger
contre le froid et la gelée grâce à la chaleur de leur propre corps.
Mais tout aussitôt ils
ressentirent des douleurs à cause de leurs piquants, ce qui les fit s'éloigner
les uns des autres. Mais là, ils se retrouvèrent seuls à souffrir du froid.
Quand le besoin de se
chauffer les eut rapprochés de nouveau, le même inconvénient se renouvela, de
façon qu'ils étaient ballotés de ça de là entre deux souffrances, jusqu'à ce
qu'ils eussent fini par trouver une distance moyenne qui leur rendît la
situation supportable.
Ainsi, le besoin de
société pousse les hommes les uns vers les autres ; mais leur nature méchante
et leurs insupportables défauts les dispersent de nouveau. La distance moyenne
qu'ils finissent par découvrir et à laquelle la vie en commun devient possible,
c'est la politesse et les bonnes manières[1].
Arthur Schopenhauer n’avait pas une très bonne image des
hommes. Il était même franchement pessimiste sur la nature des hommes. Cette
parabole de la nature humaine a quelque chose de terrible à nous sur notre
impossible entente et notre solitude inéluctable.
Néanmoins,
on peut penser que cette nature rugueuse et rétive à l’autre n’est pas non plus
une fatalité. J’aime beaucoup une image qu’employait le moine bouddhiste
thaïlandais Ajahn Chah qui rappelle étrangement Schopenhauer, même si
Ajahn Chah ne connaissait probablement la parabole du philosophe allemand. Pour
Ajahn Chah, c’est comme si nous étions bardés d’épine qui rende notre présence
pénible aux autres ; mais par la pratique des comportements éthiques, de
la compassion, de la bienveillance et l’apaisement de l’esprit dans la
méditation, nos épines s’émoussent et rapetissent. Plus nous faisons rayonner
la compassion, la douceur et la bienveillance autour de nous, moins nous sommes
difficiles à vivre, moins on « pique » les autres. L’arahant qui a
parcouru tout le chemin du Dharma a quant à lui a la peau douce comme un bébé. Il
cesse d’être une gêne pour les autres ; il ne s’irrite plus de la présence
des autres, il ne les blesse plus par son orgueil déplacé et ses crises de
jalousie. De son être et de sa présence physique émane la bienveillance et le
souhait profond que tous les êtres soient soulagés de la souffrance.
Il ne
faut donc jamais oublier de cultiver les qualités morales comme la droiture et
la générosité et les qualités du cœur comme l’amour, la bienveillance, la joie
et l’équanimité ainsi que les qualités de l’esprit comme la sagesse pour huiler
les rouages du vivre ensemble.
Une bonne lecture !!
RépondreSupprimerMerci de tout cœur, Nicolle Véron !
RépondreSupprimerMerci. C'est si bien expliqué, comme une clef donnée pour comprendre et tenter de l'utiliser dans notre quotidien
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