Être
heureux, rendre heureux, voilà le rythme de l'amour.
Sri
Nisargadatta Maharaj
Robert Doisneau |
Pour
le mystique indien Sri Nisargadatta (1897-1981), l'amour opère un
mouvement de balancier entre le fait d'être heureux et le fait de
rendre heureux. L'amour idéalement devrait n'être rythmé que de
ces deux temps. Mais on connaît la chanson : souvent, à la vie
amoureuse viennent s'adjoindre des pleurs, des crises, des jalousies,
des trahisons, des disputes, des engueulades, des ruptures, parfois
des réconciliations, et souvent d'autres ruptures. Qu'est-ce qu'on
peut se faire souffrir dans les relations amoureuses ! Pourtant,
il est important de rappeler, comme le fait Sri Nisargadatta, que
l'amour, ça sert à rendre heureux.
Le
problème est qu'on associe généralement l'amour à toutes sortes
d'émotions négatives et créatrices de souffrance comme la
jalousie, l'orgueil, la volonté de pouvoir et de domination, les
rivalités, l'attachement excessif, la rancœur, le ressentiment...
Et tout cela pollue l'amour. Pourtant, on considère que ces émotions
négatives font partie de l'amour. Cela revient à dire que les
nappes de pétrole déversé lors du naufrage d'un supertanker
pétrolier font partie de l'océan. Quand on se fait du mal dans la
relation amoureuse, il faudrait à mon sens pointer du doigt nos
faiblesses et notre attachement égotique plutôt que l'amour
lui-même. Il faut dire que la société ne nous aide pas non plus :
entre les pressions familiales, la pression sociale, les problèmes
d'argent, la compétition permanente que l'on fait régner entre les
êtres, tout cela ne prédispose à envisager l'amour comme une voie
vers le bonheur. Qu'il suffise de regarder le nombre de créations
littéraires ou de films qui mettent en scène des histoires
tragiques d'amour !
Je
pense qu'en réaction à cela, il faut développer une vision
eudémoniste (axée sur le bonheur) de l'amour. Il faut se rappeler
que l'amour est là pour rendre la vie plus agréable sur Terre, et
certainement pas pour alimenter des conflits sans fin. L'amour doit
donc se cultiver en parallèle de la sagesse, d'où d'ailleurs le mot
d'origine grecque « philosophie » ! (Philia :
amour, sophia : sagesse). Cela nécessite un travail de
transformation de soi-même de façon à accroître la bienveillance
en nous et à diminuer tout ce qui est rugueux et tranchant dans
notre être afin d'éviter de blesser constamment les autres dans nos
relations. Cela nécessite un changement progressif de la société,
une révolution de l'amour qui ne viendra pas des armes, mais bien
des cœurs (et nécessairement de la raison aussi).
Shri Nisargadatta |
Voir également à propos de l'amour:
- La parabole des hérissons (d'Arthur Schopenhauer)
- Song (d'Allen Ginsberg)
- L'union de deux de ces êtres si imparfaits (d'Alfred de Musset)
- Il faut beaucoup aimer les hommes
- Amour et sagesse dans le Banquet de Platon
Voir tous les articles et les essais autour de la philosophie bouddhique du "Reflet de la Lune" ici.
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