Jīvaka Sutta
Grotte d'Ellora, Inde |
On trouvera ici un autre soutra où Jīvaka Komārabhacca questionne le Bouddha sur la question de la consommation de la viande. Ici, Jīvaka interroge le Bouddha sur ce qui fait que l'on devient disciple laïc du Bienheureux et ce qui rend vertueux ce disciple, en insistant au passage sur le fait que le disciple est amené à pratiquer le Dharma, pas seulement pour son propre bien, son propre bénéfice, mais aussi pour le bien des autres, le bénéfice des autres. Or ce soutra relève du canon pâli, le canon en vigueur dans le bouddhisme dit du "Petit Véhicule". Or les pratiquants du Grand Véhicule prétendent que le "Petit Véhicule" prône une libération individuelle, tandis que les bodhisattvas du Grand Véhicule agissent pour le bien de tous les êtres. Ce texte est intéressant parce qu'il relativise ce genre de distinctions : ce soutra à Jīvaka montre bien que la pratique est appelée à servir le bénéfice des autres, pas seulement de sa simple personne.
En une occasion le Bienheureux
demeurait à Rājagaha, dans le bosquet de manguiers de Jīvaka.
Alors Jīvaka Komārabhacca alla trouver le Bienheureux et, en
arrivant, s'étant incliné, s'assit d'un côté. Une fois assis là,
il dit au Bienheureux:
- Vénérable, dans quelle mesure
devient-on un disciple laïc?
- Jīvaka, quand on a pris refuge
auprès du Bouddha, pris refuge auprès du Dharma, et pris refuge
auprès de la Sangha, alors, dans cette mesure, on devient un
disciple laïc.
- Et dans quelle mesure,
Vénérable, est-on un disciple laïc vertueux?
- Jīvaka, quand on s'abstient de
prendre la vie, de prendre ce qui n'a pas été donné, de la
méconduite sexuelle, des fausses paroles, et des boissons fermentées
et distillées qui entraînent la négligence, alors dans cette
mesure on est un disciple laïc vertueux.
- Et dans quelle mesure,
Vénérable, est-on un disciple laïc qui pratique pour son propre
bénéfice mais pas pour celui des autres?
- Jīvaka, quand un disciple laïc
est lui-même accompli en conviction mais n'encourage pas les autres
dans l'accomplissement de la conviction; quand lui-même est accompli
en vertu mais n'encourage pas les autres dans l'accomplissement de la
vertu; quand lui-même est accompli en générosité mais n'encourage
pas les autres dans l'accomplissement de la générosité; quand
lui-même désire voir les bhikkhus mais n'encourage pas les autres à
voir les bhikkhus; quand lui-même veut entendre le véritable Dharma
mais n'encourage pas les autres à entendre le véritable Dharma;
quand lui-même se rappelle habituellement le Dharma qu'il a entendu
mais n'encourage pas les autres à se rappeler le Dharma qu'ils ont
entendu; quand lui-même explore le sens du Dharma qu'il a entendu
mais n'encourage pas les autres à explorer le sens du Dharma qu'ils
ont entendu; quand lui-même, connaissant et le Dharma et son sens,
pratique le Dharma en accord avec le Dharma, mais n'encourage pas les
autres à pratiquer le Dharma en accord avec le Dharma: alors dans
cette mesure il est un disciple laïc qui pratique pour son propre
bénéfice mais pas pour le bénéfice des autres.
- Et dans quelle mesure,
Vénérable, est-on un disciple laïc qui pratique et pour son propre
bénéfice et pour le bénéfice des autres?
- Jīvaka, quand un disciple laïc
lui-même est accompli en conviction et encourage les autres dans
l'accomplissement de la conviction; quand lui-même est accompli en
vertu et encourage les autres dans l'accomplissement de la vertu;
quand lui-même est accompli en générosité et encourage les autres
dans l'accomplissement de la générosité; quand lui-même désire
voir les bhikkhus et encourage les autres à voir les bhikkhus; quand
lui-même veut entendre le véritable Dharma et encourage les autres
à entendre le véritable Dharma; quand lui-même se rappelle
habituellement le Dharma qu'il a entendu et encourage les autres à
se rappeler le Dharma qu'ils ont entendu; quand lui-même explore le
sens du Dharma qu'il a entendu et encourage les autres à explorer le
sens du Dharma qu'ils ont entendu; quand lui-même, connaissant et le
Dharma et son sens, pratique le Dharma en accord avec le Dharma et
encourage les autres à pratiquer le Dharma en accord avec le Dharma
: alors dans cette mesure il est un disciple laïc qui pratique et
pour son propre bénéfice et pour le bénéfice des autres.
Anguttara
Nikâya 8.26
Remarques sur la traduction : le présent soutra est issu du canon en langue pâlie, une langue proche du sanskrit, mais que le Bouddha employait pour se démarquer des brahmanes qui exprimaient leurs textes sacrés en sanskrit et pour être plus proche du peuple. Néanmoins, j'ai employé les termes sanskrits quand ceux-ci sont passés dans la langue française. Par exemple, j'emploie "Dharma", la Voie du Bouddha au lieu de "Dhamma", "soutra" au lieu de "sutta". Mais j'ai conservé le pâli pour des mots qui ne sont pas employés couramment en français: j'ai donc conservé "bhikkhu" pour moines au lieu du sanskrit "bhikshu".
Voir tous les articles et les essais du "Reflet de la lune" autour de la philosophie bouddhique ici.
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Les soutras du Bouddha:
- Soutra de Jivâka sur la consommation de la viande (Jivâka Sutta)
- Soutra de Kaccânayagotta (Kaccânayagotta Sutta)
- Soutra des Bénédictions (Mangala Sutta)
- Soutra de Samiddhi (soutra traduit du canon chinois)
- Soutra de Bâhiya (Bâhiya Sutta)
- Soutra de Samiddhi (soutra traduit du canon chinois)
- Soutra de Bâhiya (Bâhiya Sutta)
Voir toutes les citations du "Reflet de la Lune" ici.
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