Une idée importante de Thich Nhat Hanh est sans conteste son
insistance sur la notion d’inter-être. Les phénomènes n’existent qu’en
interdépendance les uns vis-à-vis des autres. Nous n’existons pas
indépendamment du monde, de manière séparée des autres êtres ; au
contraire, notre existence ne peut être pensée sans la multitude des êtres qui
composent le monde. Thay prend l’exemple d’une feuille de papier toute simple,
objet de la vie courante complètement banal à nos yeux, sans intérêt si ce
n’est celui de coucher nos pensées par écrit ou d’esquisser un dessin dessus.
Quand nous voyons la feuille, nous avons l’impression que celle-ci existe comme
un phénomène séparé : il y a une feuille de papier et elle existe sous nos
yeux et sous nos doigts. Et cette feuille se pare d’un caractère
d’évidence : elle existe, elle est bien là et elle est séparée des autres
choses. Cette évidence fait en sorte que nous n’ayons pas à porter plus
d’attention à cette feuille.
Pourtant, Thich Nhat Hanh nous invite justement à prêter
attention à cette simple feuille qui semble exister de manière
indépendante : si on la regarde profondément, nous dit-il, on verra dans
la feuille toutes sortes de choses qui sont des non-feuilles, mais sans
laquelle la feuille ne saurait être. On peut voir l’arbre duquel provient la
feuille, on peut voir le soleil qui a donné son énergie au feuillage de l’arbre
pour qu’il puisse croître, on verra aussi l’eau qui a abreuvé les racines de
cet arbre et les nuages d’où provient cette eau. On verra le vent qui a poussé
le nuage juste au-dessus de l’arbre, et ainsi de suite jusqu’à embrasser le
monde entier et sa myriade de phénomènes. C’est la doctrine du Bouddha :
rien n’existe sans cause, ni condition ; tout est produit de manière
interdépendante. « Cela est parce
que ceci est. Ceci apparaît parce que ceci apparaît ».
Il en va de même de tous les êtres dans ce monde, et
notamment des animaux. Les animaux n’existent pas indépendamment des hommes et
nous, les hommes, n’existons pas indépendamment d’eux. Pourtant, nous avons
tendance à les considérer comme de simples choses et que nous pouvons utiliser
comme bon nous semble, sans que cela porte à conséquence. Or voilà, nos actions
à l’égard des animaux ont des conséquences, et pas seulement celles qui sont
les plus évidentes et les plus criantes à première vue : les souffrances
que nous leur infligeons en les tuant, en les enfermant ou en les blessant pour
les manger, pour nous vêtir de leur peau ou pour tout autre usage que nous
faisons d’eux. Non, les conséquences de l’élevage et de l’asservissement des
animaux vont beaucoup plus loin que la souffrance animale : l’élevage
détruit l’environnement, les forêts, les terres, les rivières, les fleuves et
les côtes. L’élevage contribue massivement à produire des gaz à effet de serre,
et donc au réchauffement climatique. L’élevage ne porte pas seulement à porter
atteinte à la vie des animaux, mais contribue fortement à affamer les hommes et
les femmes sur la surface du globe. Tant et si bien que dans le phénomène
« élevage », il y a les phénomènes « déforestation »,
« réchauffement climatique », « famine », « marée verte »
et d’autres encore… Ce sont là des conséquences qu’il faut envisager quand on
observe le phénomène « élevage des animaux en vue de faire de la
viande ». Comprendre les liens d’interdépendance qui unissent tous les
êtres de ce monde. Et unir cette vision profonde à la compassion envers les
êtres sensibles, clef de voûte de la doctrine bouddhique.
白文殊
Voir tous les articles et les essais du "Reflet de la lune" autour de la philosophie bouddhique ici.
Bonjour, est-ce que le texte qui apparaît en petits caractères est un texte de Thich Nhat Hahn ? Pourriez-vous transmettre la référence, s'il vous plaît ? :-)
RépondreSupprimerNon, il est de moi! C'est juste une bizarrerie du blog qui retranscrit en petit certaines parties du texte sans que je l'ai rien demandé ! Le texte est donc de moi, mais s'inspire beaucoup des écrits de Thich Nhat Hahn.
RépondreSupprimerUne très bonne journée !
Merci !
RépondreSupprimer