Voulez-vous une métaphore de la vie et la mort ?
Mettez
en parallèle l'eau avec la glace.
Que
l'eau se fige et elle devient glace,
Que
la glace fonde et elle redevient eau.
Ce
qui est mort doit forcément renaître,
Ce
qui quitte la vie s'en retourne à la mort.
L'eau
et la glace ne se causent aucun mal ;
Vie
et mort, l'une et l'autre, possèdent leur beauté.
Hanshan
(寒山, VIIème siècle)
Cal Snape, Bow Lake, Alberta, Canada |
Voilà
une métaphore particulièrement intéressante. D'habitude, nous
avons tendance à opposer la vie et la mort comme deux choses
irréductibles l'une à l'autre. La vie est fondamentalement une
chose positive tandis que la mort est une chose sombre et menaçante.
Faisons
d'ailleurs un petit jeu. Il s'agit de donner le contraire de chaque
mot dans la liste qui va suivre. Répondez du tac au tac sans
réfléchir. Il n'y a pas de piège. L'intérêt est de répondre
spontanément.
Grand
- bas - blanc - nuit - mince - pile - méchant - mort
*****
Il
est très probable que vous ayez répondu : petit, haut, noir,
jour, gros, face, gentil et vie. Un Indien (d'Inde) aurait répondu
exactement la même chose que vous, sauf pour le dernier terme. Dans
la mentalité indienne, le contraire de la mort, ce n'est pas la vie,
mais bien la naissance. L'existence est vu comme un cycle de
naissances et de morts. On naît, on vit, on meurt, puis on renaît.
La mort dans cette conception n'est jamais qu'une phase de la vie.
Hanshan,
lui, compare la vie et la mort aux états liquides et solide de
l'eau : l'eau et la glace ne s'opposent pas frontalement et ne
sont pas deux choses complètement différentes. C'est la même
matière, mais dans des états qui diffèrent. La vie coule dans nos
veines ; et quand on meurt, c'est comme si cette vie gelait et
s'immobilisait. Mais dans la mort, la vie reprend très vite ses
droits. Ce n'est plus la même vie, mais du corps inerte et mort d'un
être humain ou d'un animal, toutes sortes d'organismes et d'animaux
vont se repaître pour relancer le cycle de la vie. Dans la Nature,
tous les composés organiques se décomposent pour permettre à la
vie d'émerger et de croître dans toute la luxuriance de la vie.
Ce poème de Hanshan est emprunté du livre « Poèmes Chan » aux éditions Picquier, traduction de Jacques Pimpaneau, Arles, 2005 (2016 pour l'édition de poche).
Voir également :
Callum Snape, le lac Vermillion en hiver, Banff, Canada. |
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