À
un homme partant pour la chasse
Victor
Hugo
Oui,
l’homme est responsable et rendra compte un jour.
Sur cette terre où l’ombre et l’aurore ont leur tour,
Sois l’intendant de Dieu, mais l’intendant honnête.
Tremble de tout abus de pouvoir sur la bête.
Te figures-tu donc être un tel but final
Que tu puisses sans peur devenir infernal,
Vorace, sensuel, voluptueux, féroce,
Échiner le baudet, exténuer la rosse,
En lui crevant les yeux engraisser l’ortolan,
Et massacrer les bois trois ou quatre fois l’an ?
Ce gai chasseur, armant son fusil ou son piège,
Confine à l’assassin et touche au sacrilège.
Penser, voilà ton but ; vivre, voilà ton droit.
Tuer pour jouir, non. Crois-tu donc que ce soit
Pour donner meilleur goût à la caille rôtie
Que le soleil ajoute une aigrette à l’ortie,
Peint la mûre, ou rougit la graine du sorbier ?
Sur cette terre où l’ombre et l’aurore ont leur tour,
Sois l’intendant de Dieu, mais l’intendant honnête.
Tremble de tout abus de pouvoir sur la bête.
Te figures-tu donc être un tel but final
Que tu puisses sans peur devenir infernal,
Vorace, sensuel, voluptueux, féroce,
Échiner le baudet, exténuer la rosse,
En lui crevant les yeux engraisser l’ortolan,
Et massacrer les bois trois ou quatre fois l’an ?
Ce gai chasseur, armant son fusil ou son piège,
Confine à l’assassin et touche au sacrilège.
Penser, voilà ton but ; vivre, voilà ton droit.
Tuer pour jouir, non. Crois-tu donc que ce soit
Pour donner meilleur goût à la caille rôtie
Que le soleil ajoute une aigrette à l’ortie,
Peint la mûre, ou rougit la graine du sorbier ?
Dieu
qui fait les oiseaux ne fait pas le gibier.
Victor Hugo, Dernière Gerbe (Œuvre posthume).
Scène de Dead man, de Jim Jarmusch, 1995. |
Voilà
un très beau poème contre la chasse de Victor Hugo. L'homme a
peut-être un raison d'être dans la Création du fait de son
intelligence, de son esprit, de sa civilisation, mais cela ne lui
donne pas tous les droits sur la Création. En fait, beaucoup plus
que de droits, l'homme reçoit une responsabilité envers les
créatures qui peuplent la Nature : « Sois l’intendant
de Dieu, mais l’intendant honnête. Tremble de tout abus de pouvoir
sur la bête ». Nos capacités et notre ingéniosité à
dominer la Nature et les animaux qui y vivent ne nous donne pas un
pouvoir absolu sur eux, ni la liberté de les exploiter sans
scrupule. L'homme a une destinée tellement plus haute que celle de
se vautrer dans le meurtre et la destruction : « Penser,
voilà ton but ; vivre, voilà ton droit. Tuer pour jouir, non ».
J'aime ce poème de Victor Hugo, car il nous invite à repenser la
tyrannie infernale que les hommes ont fait peser sur les animaux
depuis des siècles, mais dont l'ampleur s'est considérablement
accrue depuis le XXème siècle et l'industrialisation de
l'élevage et de la pêche. Il redonne à l'homme un rôle
d'intendant honnête dont la gloire est de développer sa pensée, un
intendant honnête qui respecte et aime le jardin qu'est ce monde. Or
l'exploitation féroce des animaux telle qu'elle existe encore
malheureusement aujourd'hui n'est évidemment pas bonne pour les
animaux, êtres doués de sensibilité, mais pas bonnes non plus pour
les écosystèmes, et donc pas bonne pour l'Homme en dernier ressort.
Une invitation encore à repenser notre rapport aux animaux.
Kobi Refaeli |
Autre poème de Victor Hugo :
Voir tous les articles et les essais du "Reflet de la lune" autour du végétarisme et du véganisme ici.
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