Baizhàng
Huáihái, alors un humble
moine Chán,
rendit visite au grand maître Mazŭ
Dàoyī.
-
Qu'est-ce qui t'amène par ici ? demanda Mazŭ.
-
Je viens chercher le Dharma du Bouddha.
-
Tu ne vois même pas le trésor caché dans ta propre demeure, alors
à quoi bon errer ça et là ? Ici je n'ai rien à te donner,
quelle Dharma du Bouddha pourrais-je te donner ?
Baizhàng
s'avança, se prosterna et demanda :
-
Qu'est-ce que le trésor de ma propre demeure ?
-
Cela même qui est train de m'interroger à cet instant précis
constitue ton trésor. Il contient tout ce dont tu as besoin, rien ne
manque. Tu es libre d'y puiser, pourquoi continuer à chercher à
l'extérieur ?
À
ces mots, Baizhàng
s'éveilla à son esprit originel. Débordant de joie, il présenta
ses respects à Mazŭ
et le remercia.
Kuncan (1612-1673), Paysage après une nuit de pluie torrentielle, 1660 |
Voilà
une petite histoire du maître Chán,
Mazŭ
(709–788), et de son disciple Baizhàng
(720–814).
(Pour rappel, le Chán
est plus connu en Occident sous son nom japonais de Zen).
Il y est question de trouver l’Éveil, la vérité suprême. La
tentation est toujours de trouver la vérité et les bienfaits
en-dehors de soi-même : on a appris les mathématiques,
l'écriture d'un professeur. Nous n'avions pas ces savoirs en nous au
moment de notre naissance. Et tous les bienfaits de l'existence, nous
les tenons d'autrui ou d'autre chose : le confort matériel
provient de la maison et des richesses dont nous disposons, le
bonheur familial provient de la famille, l'amour provient de la
personne aimée, la réussite provient du milieu professionnel dans
lequel nous évoluons, et ainsi de suite.... Mais la même logique ne
fonctionne pas avec la quête spirituelle.
L’Éveil
ne peut pas provenir de l'extérieur. Bien sûr, on peut enseigner
les soûtras du Bouddha, les grands textes philosophiques du
bouddhisme, les préceptes moraux, les techniques de méditation, tel
ou tel rituel, mais tout cela n'est pas la véritable essence du
Dharma. La véritable essence ne se donne pas. Personne ne peut vous
la donner car elle est en vous. Comment la trouver dès lors si
personne ne peut nous indiquer où elle se trouve ? Au fond,
nous dit Mazŭ,
cet Éveil se trouve dans cette disposition que nous avons en nous de
chercher l’Éveil. Dans la philosophie bouddhique, on appelle cela
l'esprit d’Éveil, bodhicitta en sanskrit. S'en suit une
dialectique subtile où nous avons besoin des autres pour qu'ils nous
disent que l’Éveil est en nous. Comme si nous partions à travers
monts et par vaux pour trouver le trésor caché dans notre propre
demeure.
Bǎizhàng |
Voir tous les articles et les essais du "Reflet de la lune" autour du Chan et du Zen ici: 禪
Voir tous les articles et les essais autour de la philosophie bouddhique du "Reflet de la Lune" ici.
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