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jeudi 6 juin 2019

Accepter le temps d'un instant





En fait, quand vous lâchez prise, ce n’est pas la situation dans sa globalité que vous devez accepter, mais juste ce minuscule segment appelé instant présent.

Eckhart Tolle, « Le pouvoir du moment présent ».




















Alors je dis tout de suite que je ne suis pas un grand fan d'Eckhart Tolle. Je n'ai rien contre lui ; mais pour moi, il n'est qu'un ersatz de Thich Nhat Hanh. Il a un peu le même genre de message sur l'importance de l'instant présent que le moine vietnamien, mais en plus fade. Cependant, je trouve que cette citation me parle et pointe directement sur quelque chose d'essentiel. Dans la spiritualité et dans certaines philosophies, on parle de l'acceptation. Accepter les événements qui nous arrivent, même si ceux-ci sont déplaisants. Au lieu d'être déprimé ou aigri par ces choses choses négatives, on les accepte.


On retrouve cela dans le bouddhisme bien sûr, mais aussi dans le stoïcisme (amor fati, l'amour du destin), chez Spinoza ou encore chez Swami Prajñanpad. Mais une critique que l'on fait à ces philosophies de l'acceptation, c'est qu'elles conduisent à la résignation et au défaitisme, ou encore que cette acceptation est tellement au-delà de nos forces qu'elle en est contre-nature.


C'est l'époque des examens. Vous êtes peut-être un étudiant qui s'est perdu sur ce blog alors qu'il devait étudier. Si vous n'en êtes pas un, imaginez que vous êtes un étudiant à un ou deux jours d'un examen. La pression est maximale, le stress est à son comble : votre estomac est noué, et vous êtes de plus en plus fébrile à mesure que le temps passe. Imaginez que vous faites une pause dans votre étude et que vous vous mettez à pratiquer la méditation. Vous pourriez vous dire qu'il faut accepter pleinement ce processus des examens et retrouver la sérénité. Cela va peut-être marcher quelques minutes, mais très vite, le stress va reprendre le dessus de plus belle.


Ce qu'il importe de faire, c'est d'accepter le stress dans ce moment présent, pas tout le stress des examens, car vous n'allez pas être capable de porter le fardeau dans son entièreté, ni d'être serein face à tout cela. Mais laissez un espace d'ouverture au stress qui se profile dans le moment présent. Lâchez prise avec ce stress qui apparaît ici et maintenant, laissez-le apparaître et laissez-le disparaître. Ne cherchez pas à être plus fort que lui, arrêtez simplement de le saisir le temps d'un instant. Le moine thaïlandais Ajahn Chah donnait cette image : tenez un gros livre dans votre main à bout de bras, cela ne pose pas de problème. Tenez maintenant ce livre une heure durant à bout de bras, et ce sera un exercice particulièrement éprouvant. La méditation est justement ce moment où on se permet de relâcher les choses et de cesser de porter le poids de l'existence pour quelques instants.


Quand une situation stressante ou pénible comme des examens ou une maladie se produit, il faut voir que cette situation se décompose en toute une série d'instants stressants ou pénibles. C'est dans ces instants que vous avez une possibilité d'action, une possibilité de lâcher-prise, une possibilité de changer quelque peu votre relation à cette situation pénible ou stressante.


Cette situation peut être aussi une injustice. Et souvent on dit que les philosophies prônant l'acceptation conduise à la résignation, à l'inaction et à la passivité. Prenons l'exemple d'un militant des droits de l'homme qui a été arrêté en Chine. Cela nous révolte. Certains diront que ceux qui prônent l'acceptation sont du côté de la dictature et de la police chinoise en acceptant ce qui est inacceptable. Mais c'est un contresens, précisément si on comprend qu'on n'accepte pas toute la situation d'injustice dans sa globalité, mais ce petit segment dans le temps qui est cet instant où on prend connaissance de ce fait révoltant. L'acceptation se joue là dans cet instant précis. L'acceptation ne préconise rien, ne dit pas que l'inaction est la règle. L'acceptation délivre notre cœur de la colère et de la rancœur. Mais elle n'interdit pas l'action ou la réaction. Protester devant l'ambassade de Chine par exemple ou répondre à une action d'Amnesty International par exemple.


Voilà donc. Je ne suis pas sûr d'adhérer à la globalité des propos d'Eckhart Tolle. De lui, je n'ai lu que des bouts de livres et regarder des bouts de conférences. J'avoue que ses livres me tombent des mains et que ses conférences me font bailler. Mais au moins, j'accepte et j'approuve ce minuscule segment de son œuvre, cette courte citation dont je viens de vous parler.


















Manifestation à Oakland









Lire également : 


Résignation et acceptation (Non, ces deux termes ne sont pas synonymes!)


Joie (Qu'est-ce que la joie spirituelle prônée par le Bouddha ?)


- Les trois dimensions temporelles de la méditation



Bardo



- La boîte de Pandore


Changer les choses


La perspective de changer les choses














Le yoga nous amène au moment présent, le seul endroit où la vie existe














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