Les bienfaits de l'Esprit d'Éveil (I,1 – I,2 et I,3)
1. Je m'incline avec respect devant Ceux-Allés-en-la-Joie
qui possèdent le Corps du Dharma,
Devant leurs fils et devant toutes les personnes dignes de vénération.
Je vais exposer brièvement, en accord avec les écritures,
L'engagement dans les vœux des Fils de Ceux-Allés-en-la-Joie.
2. Il n'y a rien ici qui n'ait été expliqué auparavant,
Et je ne suis pas habile dans l'art de la rhétorique.
Ce n'est donc pas avec la pensée du bien d'autrui,
Mais pour y accoutumer mon esprit que j'ai composé ceci.
3. Il est possible qu'en raison de cette accoutumance au bien
La force de ma foi croisse pour un temps grâce à cette composition.
Et si d'autres dont la fortuen égale la mienne
La voient, elle leur sera peut-être profitable.
Shāntideva commence son texte en se situant dans le sillage des Bouddhas – Ceux-Allés-en-la-Joie (Sugata en sanskrit) et de tous ceux qui ont suivi avec fruit les enseignements du Bouddha, essentiellement les Arahants et les Bodhisattvas ainsi que toutes les personnes qui ont développé une véritable sagesse en eux et qui ont incarné cette sagesse dans le monde.
Il est à noter que Shāntideva ne revendique aucune innovation, aucune théorie personnelle : « Il n'y a rien ici qui n'ait été expliqué auparavant ». Il n'est finalement qu'un passeur d'un enseignement beaucoup plus ancien que sa petite personne. Et il n'est pas là non plus pour briller en société en faisant de beaux discours pleins d'éloquence et de panache. Enfin, il n'est pas là pour se faire passer pour un docte sage qui inculque sa sagesse à des ignorants, mais en fait cet exercice de mettre en mots ce qu'il a compris du message du Bouddha est en lui-même un exercice spirituel pour l'encourager à cultiver la « pensée du bien d'autrui ». En parlant de la pensée du bien d'autrui, on développe cette même pensée : c'est donc une pensée tournée vers la transformation intérieure. On ne pense pas qu'on est sage, mais on essaye de tendre vers un petit peu plus de sagesse dans chaque instant de notre vie.
On est donc très loin de la philosophie moderne où chaque philosophe essaye de développer son propre système en contradiction avec les autres, en essayant de dire quelque chose de nouveau qui n'a pas déjà été dit, et où ce système brillant et séduisant s'arrête aux limites du discours, sans jamais essayer de se traduire dans un mode de vie ou dans un effort de transformation intérieure.
Je
me souviens d'un camarade à la faculté de philosophie qui me
demandait inquiet : « Tu crois qu'il faut absolument créer
son propre système philosophique ? » Ce n'était pas
vraiment une inquiétude pour moi. Ce qui me préoccupait beaucoup
plus et qui me préoccupe toujours, c'est d'orienter sa vie vers plus
de sagesse, vers plus de bienveillance et vers plus de bonheur. À
quoi
bon un système philosophique tarabiscoté si cela ne transforme pas
votre vie dans le sens du mieux ? À
quoi
bon un système philosophique tarabiscoté si ce n'est rien d'autre
que du bavardage ? Pour ma part, j'essaye d'être profitable à
mon prochain.
Voir également :
- Les bienfaits de l'Esprit d'Eveil (I, 4)
- Les bienfaits de l'Esprit d'Eveil (I,5)
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