Tous
les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites,
orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes
sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ;
le monde n'est qu'un égout sans fond où les phoques les plus
informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y
a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces
êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour,
souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est
sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière et
on se dit : j'ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois ;
mais j'ai aimé. C'est moi qui ai vécu, et non pas un être factice
créé par mon orgueil et mon ennui.
Alfred
de Musset, On ne badine pas avec l'amour,
1834.
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Robert Doisneau, La dernière valse ou la valse du 14 juillet, rue des Canettes, 1949 |