Commentaire au Soûtra de l'Attention au Va-et-vient de la Respiration
L'Ānāpānasati Sutta
est un des soûtras les plus connus du Bouddha, traitant de la
méditation, avec le Soûtra des Quatre Établissements
de l'Attention (Satipatthana Sutta). L'Ānāpānasati
Sutta appartient
à la collection des Soûtras (Sutta
Pitaka),
une des trois « corbeilles » qui réunissent l'entièreté
des enseignements du Bouddha, et plus précisément, dans ce Sutta
Pitaka,
l'Ānāpānasati
Sutta est
rangé en 118e
place dans le Majjhima
Nikāya,
la section qui regroupe les soûtras de taille moyenne.
En
langue pâlie, sutta
signifie soûtra, sati
désigne l'attention, la vigilance dont on fait preuve en méditation
et le terme ānāpāna
signifie
le fait d'inspirer et expirer, va-et-vient de la respiration.
Ānāpānasati
Sutta
peut donc se traduire par « Soûtra
de l'Attention au Va-et-vient de la Respiration ».
Thich Nhat Hanh traduit le titre par « Soûtra
de la Pleine Conscience au Va-et-vient de la Respiration »,
mais il me semble que sati
désigne beaucoup plus l'attention, l'acte d'être vigilant à ce qui
se passe en nous, dans notre perception des choses. La Pleine
Conscience est beaucoup plus la résultante d'une longue pratique de
l'attention. L'attention est la cause, la Pleine Conscience la
conséquence, le fruit de cette pratique longue et répétée de
l'attention, il me semble. Au départ, nous ne sommes pas très
conscient de notre corps et de nos pensées, notre esprit est emporté
comme un fétu de paille par le vent dans toutes sortes de
distractions qui accaparent notre mental. C'est comme si notre esprit
était dans les ténèbres où il ne peut discerner que des ombres.
Puis on se met à pratiquer l'attention soutenue dans la méditation.
L'attention est à ce moment-là comme une bougie qui n'éclaire que
faiblement et partiellement le lieu où on est. Un simple coup de
vent éteint la petite lueur de notre bougie. Puis à force de
pratiquer l'attention soutenue, la bougie devient une torche, puis
une lampe qui permet de discerner plus clairement les choses et de
manière beaucoup plus approfondie. Enfin la lumière de l'attention
s'apparente à la clarté de la lune, puis à l'éclat du soleil ;
et c'est ce que j'appelle la « Pleine Conscience ». Pour
arriver à cette Pleine Conscience, il faut tout un cheminement, une
progression de notre capacité à développer l'attention. Et ce
n'est pas gagné d'avance tant sont fortes nos tendances à la
distraction et à l'agitation mentale qui détourne le mental de la
contemplation sereine de notre objet de méditation.
Je
sais que le terme « Pleine Conscience » et surtout son
équivalent en anglais « Mindfullness »
sont très à la mode de nos jours ; ils ont échappé aux
enseignements de Thich Nhat Hanh pour gagner des courants de
psycho-thérapie, par l'entremise notamment de Jon Kabat-Zinn, et se
répandent aujourd'hui dans de nombreuses sphères de la société.
Loin de moi l'idée de critiquer cet engouement pour la méditation,
mais je pense qu'on induit en erreur les gens si on leur fait croire
qu'ils vont être en « pleine conscience » dès lors
qu'ils se seront assis sur un coussin de méditation. En fait, ils
vont devoir entretenir la petite lueur vacillante de l'attention
avant d'élargir très progressivement la capacité d'être
pleinement conscient de tout ce qui constitue notre notre être.
*****
L'Ānāpānasati
Sutta
se compose essentiellement de quatre parties. Dans la première
partie, on donne des informations quant au contexte dans laquelle
s'est tenu cet enseignement du Bouddha. À
la fin de la saison des pluies, la mousson, qui était réservé à
une retraite de méditation pour les moines bouddhistes, cela afin de
ne pas écraser sur leur passage les petits animaux qui pullulaient
en cette saison du fait des pluies abondantes, le Bouddha annonce
qu'il va rester en retraite un mois de plus et qu'il donnera un
enseignement important à la prochaine lune, le temps de permettre
aux moines vivant dans d'autres cités de se rassembler et de
converger vers Sāvatthi
où se trouve le Bienheureux.
Le
jour dit, il entame un enseignement où il se félicite de la qualité
de la Sangha, de la communauté des moines en commençant par
détailler les moines qui ont atteint un des quatre fruits de la
pratique du Dharma : par ordre décroissant d'avancement, l'état
d'Arahant, l'état de Sans-Retour, l'état de Retour Unique et l'état
d'Entrée-dans-le-Courant. Puis il détaille tous les types de
méditations particulières que peuvent pratiquer ceux qui cheminent
dans la Voie du Bouddha. Enfin il mentionne la pratique de
l'attention au va-et-vient de la respiration. Il explique que c'est
une excellente pratique qui permet de développer les quatre
établissements de l'attention. Et ces quatre établissements de
l'attention vont à leur tour permettre d'enclencher les sept
facteurs de l’Éveil. Ces sept facteurs de l’Éveil vont enfin
permettre d'entrer de plein pied dans al compréhension et la
Libération définitive.
La
deuxième partie de ce soûtra est l'explication détaillée de la
méthode de l'attention au va-et-vient de la respiration. Seize
pratiques spécifiques sont enseignées par le Bouddha afin de
développer l'attention dans les différentes dimensions de notre
être. Les quatre premières pratiques envisagent notre rapport aux
corps, les quatre suivantes traitent de nos sensations, les quatre
suivantes ont trait à l'esprit tandis que les quatre dernières
parlent des objets qui peuvent occuper notre esprit.
La
troisième partie de ce soûtra évoque en fait comment les pratiques
de l'attention au va-et-vient de la respiration vont permettre de
développer méthodiquement les quatre établissements de
l'attention : à savoir, l'attention au corps dans le corps,
l'attention aux sensations dans les sensations, l'attention à
l'esprit dans l'esprit, l'attention aux objets de l'esprit dans les
objets de l'esprit.
Dans
la quatrième partie de l'Ānāpānasati
Sutta,
le Bouddha explique comment ces quatre établissements de l'attention
vont permettre de développer les sept facteurs de l’Éveil :
à savoir, l'attention, l'investigation des phénomènes, l'effort,
la joie, la souplesse, la concentration et l'équanimité. Ces sept
facteurs de l’Éveil vont à leur tour nous mettre dans les bonnes
dispositions pour atteindre la compréhension et la Libération.
La suite de ce commentaire ici : 2ème partie - 3ème partie - 4ème partie 5ème partie 6ème partie
Lire le Soutra de l'Attention au Va-et-Vient de la Respiration
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