Jîvaka Sutta
(Sermon pour Jîvaka, “Celui de la Vie”)
Sutta Pitaka, Majjhima-Nikâya nº 55
(Voir le commentaire de ce Soûtra)
Ainsi ai-je entendu, un jour que le Bienheureux demeurait à Râjagaha dans le bois de manguiers appartenant à Jîvaka Komârabhacca, le fils adoptif du roi Bimbisara.
Ce dernier était allé voir le Bienheureux et après l’avoir salué avec respect, il s’était assis à son côté et lui avait parlé ainsi : « Vénérable, voici ce que j’ai entendu : ‘On tue des êtres vivants pour nourrir l’ascète Gotama[1], qui mange délibérément de la chair d’animaux tués pour lui ». Vénérable, ceux qui s’expriment ainsi disent-ils vrai ?”
“ Jîvaka, ceux qui s’expriment ainsi ne disent pas la vérité et en tout cas déforment ce que j’ai pu dire. Jîvaka, je dis qu’il y a trois situations où l’on ne devrait pas consommer de chair animale : si l’on a vu, entendu, ou simplement que l’on suspecte que cette chair a été préparée en vue de notre consommation personnelle. Corollairement, je dis que l’on peut consommer de la chair animale s’il est clair que celle-ci n’a pas été préparée à notre intention.
Considère, Jîvaka, un moine (bhikkhu) qui dépend pour sa subsistance du bon vouloir d’un village ou d’une ville. Il rayonne de toute sa personne un esprit de bienveillance, de compassion, de joie pleine de sympathie, et d’équanimité. Il répand tout autour de lui, une bienveillance, une compassion, une joie pleine de sympathie et une équanimité, incommensurables ; et il est sans agressivité et sans hostilité à l’égard de quoi que ce soit. Alors quelqu’un vient et l’invite à partager un repas. Le moine accepte si cela lui convient. Aussi, à l’aurore, il s’habille et prend son bol, va à la maison de son hôte et s’assied sur la chaise qu’on lui présente. Puis son hôte lui offre un bon repas. Le moine n’a pas à penser : « Cette nourriture est délicieuse, j’espère que cette personne continuera à me servir dans le futur de tels repas ! » Non, il ne pense pas ainsi. Il mange cette nourriture offerte sans la désirer au point d’en devenir dépendant. Que penses-tu, Jîvaka ? Le moine a-t-il, à ce niveau, commis un mal à l’égard de qui que ce soit ?”
“Non, Vénérable.”
“Dirais-tu que le moine se
sustente de nourritures irréprochables ?”
“Oui, Vénérable, car j’ai
entendu que la voie du divin se trouve dans la bienveillance, la compassion, la joie pleine de sympathie et
l’équanimité. Et le Bienheureux qui demeure dans la bienveillance, la
compassion, la joie pleine de sympathie et l’équanimité en est la preuve
vivante pour moi.”
“Jîvaka, toute avidité, toute haine et toute illusion donnant naissance à la malveillance ont été évacuées par le Tathâgata [2]. Il en a arraché jusqu’à la racine, de telle façon qu’elles ne peuvent plus renaître. Si ton souci se situe au niveau de la compatibilité de cette sainte réalité par rapport au fait de consommer de la chair animale, alors je veux bien continuer sur ce sujet”.
“Oui, Vénérable, ceci est mon
souci.”
“Jîvaka, si quelqu’un tue un
être vivant pour le Tathâgata ou son disciple, on peut dire qu’il a commis du
mal par cinq fois. Premièrement, dans la pensée même de capturer un être
vivant. Deuxièmement, du fait que cet être vivant ressent peur et souffrance
lorsqu’il est capturé ou mené à sa mort. Troisièmement, par la pensée même de
tuer. Quatrièmement, du fait que cet être vivant ressent peur et souffrance pendant
qu’on le tue. Et cinquièmement, du fait même de fournir au Tathâgata ou à son
disciple une nourriture qui ne devrait pas leur être destinée. Ainsi, quiconque
tue un être vivant pour en offrir la viande au Tathâgata ou à son disciple
commet du mal selon ces quatre aspects, et en plus selon ce cinquième aspect.”
Cette clarification faite, Jîvaka Komârabhacca s’exclama : “C’est merveilleux, Vénérable, c’est merveilleux. Je suis heureux que les moines se nourrissent ainsi. À partir d’aujourd’hui, puisse le Bienheureux me considérer comme son disciple laïque, qui s’est réfugié auprès de lui pour le reste de sa vie.”
Traduction
provisoire du pâli par le Dr Gabriel Jîvasattha Bittar
Voir tous les articles et les essais du "Reflet de la lune" autour du végétarisme ici.
Les soutras du Bouddha:
- Soutra de Kaccânayagotta (Kaccânayagotta Sutta)
- Soutra des Bénédictions (Mangala Sutta)
- Soutra de Jîvaka sur les disciples laïcs (Jîvaka Sutta)
- Soutra de Samiddhi (soutra traduit du canon chinois)
- Soutra de Bâhiya (Bâhiya Sutta)
- Soutra de Jîvaka sur les disciples laïcs (Jîvaka Sutta)
- Soutra de Samiddhi (soutra traduit du canon chinois)
- Soutra de Bâhiya (Bâhiya Sutta)
Voir toutes les citations du "Reflet de la Lune" ici.
[1] Nom de famille du Buddha.
[2] Terme désignant le Bouddha,
littéralement « Celui qui est venu ainsi » ou « Celui qui est
allé ainsi ».
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