Un nomade de la raison
sur les chemins d’Élis à Taxila
9ème partie
9ème partie
Le compte-rendu d'Aristoclès de Messène sur la philosophie de Pyrrhon
Mais
venons-en à sa doctrine proprement dite. Pyrrhon, n’ayant rien
écrit, on n’a rien conservé de sa main. Timon de Phlionte, son
principal disciple, a bien écrit sur lui ; mais
malheureusement, nous n’avons de Timon que des extraits de ses
œuvres satyriques qui prenaient pour cible les philosophes du passé
ainsi que les philosophes de son temps. Aenésidème et Sextus
Empiricus ont écrit abondamment sur le scepticisme, mais ils sont
très éloignés dans le temps. Aenésidème se situe plus ou moins
au premier siècle avant notre ère ; il devait être un peu
plus vieux que Cicéron ; et Sextus Empiricus aurait vécu au
second siècle de notre ère.
Comme la philosophie sceptique est
« une philosophie critique et d’opposition1 »,
elle est évolutive dans son essence même, d’autant plus que ses
fondateurs n’ont posé aucun dogme incontournable. On peut penser
que leur philosophie présente des changements par rapport à la
conception pyrrhonienne du scepticisme. Néanmoins, notre cause n’est
pas perdue, Eusèbe de Césarée, un des pères de l’Eglise, a
recopié mot pour mot un texte d’Aristoclès de Messène dans un
livre, les Préparations
Evangéliques,
où il expose les différentes thèses philosophiques de son époque
dans un but apologétique évident. On ne sait quasiment rien de cet
Aristoclès de Messène ; pour tout dire, on n’est même pas
sûr qu’il soit originaire de Messène dans le Péloponèse, car
c’est peut-être d’Aristoclès de Messine (en Sicile) dont il
faut parler ! Tout ce que l’on sait, c’est qu’Aristoclès
était un aristotélicien qui a vécu au premier siècle de notre ère
et qui a rédigé un travail où il présente les différentes
doctrines afin de mieux les réfuter à la gloire d’Aristote. Dans
ce texte, il explique la théorie de Pyrrhon à partir des écrits de
Timon de Phlionte qu’il devait avoir sous les yeux ; ce qui
donne à cet exposé une grande valeur historique2.
Voici
donc le texte en question3 :
« Il
est nécessaire, avant tout, de faire porter l’examen sur notre
pouvoir de connaissance, car si la nature ne nous a pas faits
capables de connaître, il n’y a plus à poursuivre l’examen de
quelque autre chose que ce soit. Il y a eu, effectivement, autrefois,
des philosophes pour émettre une telle assertion, et Aristote les a
réfutés.
Cependant Pyrrhon d’Elis aussi soutint en maître cette
thèse. Il est vrai qu’il n’a laissé aucun écrit, mais Timon,
son disciple, dit que celui qui veut être heureux a trois points à
considérer : 1°) d’abord quelle est la nature des choses ;
2°) ensuite dans quelle disposition nous devons être leur égard ;
3°) enfin, ce qui en résultera pour ceux qui sont dans cette
disposition.
1°) Les choses, dit-il, il
[Pyrrhon] les montre également in-différentes, im-mesurables,
in-décidables. C’est pourquoi ni nos sensations, ni nos jugements,
ne peuvent dire vrai, ni se tromper.
2°) Par suite, il ne faut pas leur
accorder la moindre confiance, mais être sans jugement, sans
inclination d’aucun côté, inébranlable, en disant de chaque
chose qu’elle n’est pas plus qu’elle n’est pas, ou qu’elle
est et n’est pas, ou qu’elle n’est ni n’est pas.
3°)
Pour ceux qui se trouvent dans ces dispositions, ce qui en résultera,
dit Timon, c’est d’abord l’aphasie, puis l’ataraxie… »
*****
Que sais-je?
Arrêtons-nous
à chaque paragraphe pour le commenter. « Il
est nécessaire de, avant tout, de faire porter l’examen sur notre
pouvoir de connaissance, car si la nature ne nous a pas faits
capables de connaître, il n’y a plus à poursuivre l’examen de
quelque autre chose que ce soit ».
Le scepticisme commence avec la question « Que sais-je ? »,
qui fut la devise de Montaigne qui a été très influencé par
Pyrrhon et Sextus Empiricus, ou la question « Que puis-je
savoir ? » qui est la question de la Critique
de la Raison Pure
d’Emmanuel Kant dans le thème était, doit-on le rappeler, de
restreindre les prétentions des dogmatiques à la connaissance du
noumène et des idées métaphysiques comme Dieu, l’univers, l’âme.
Cette restriction concédée aux sceptiques était la condition
nécessaire pour Kant pour sauver la connaissance scientifique de
l’empirique.
Pyrrhon
s’interroge sur la portée et l’efficacité du savoir, mais
parvient à la conclusion de la déficience de ce savoir. Cette
faiblesse, on peut la constater empiriquement. Pyrrhon ne la proclame
pas dogmatiquement comme certains prédicateurs prêchent que tel
homme, tel pays ou l’humanité toute entière connaît une
malédiction terrible suite à une série de péchés contre les
dieux, malédiction qui frapperait tous les hommes de cécité et de
surdité face aux objets de connaissance…
Pyrrhon constate que,
dans la nature, nos sens et notre raison défaillent quant à la
capacité de connaître et de savoir. C’est un constat empirique.
Aristoclès explique qu’Aristote a autrefois attaqués ces
philosophes qui nient toute connaissance : « Aristote
les a réfutés »,
dit-il. J’ai déjà mentionné plus haut l’argument d’Aristote :
ces philosophes ont nié qu’un savoir soit possible, mais alors
comment savent-ils que le savoir est impossible ? Ce savoir
qu’il n’y a pas de savoir est lui-même un savoir métaphysique.
Ces philosophes entrent donc en contradiction avec eux-mêmes.
Mais
pour Pyrrhon, cette assertion selon laquelle aucun savoir n’est
possible n’est en rien une assertion dogmatique et logique à
mettre sur le même plan que : « Dieu existe » ou
« l’univers est éternel ». Le sceptique observe
empiriquement que le savoir est généralement pris en défaut ;
c’est pourquoi il prend le pli de ne pas adhérer à des dogmes et
des croyances quelconques. Le sceptique refuse donc de s’appuyer
sur l’assertion « aucun savoir n’est possible » si
cette assertion prend elle-même une tournure dogmatique : le
fait que le savoir est inaccessible, cela même, on ne peut pas le
savoir avec une certitude absolue ! Autrement dit : si tout
est douteux, le fait que tout soit douteux est lui-même douteux.
« Si
la nature ne nous a pas faits capables de connaître, il n’y a plus
à poursuivre l’examen de quelque autre chose que ce soit ».
Cette phrase laisse penser que Pyrrhon avait abandonné toute
recherche philosophique, puisque la nature ne nous dote pas de la
disposition de connaître. Si l’on écarte la connaissance du champ
des possibles, alors la recherche de la vérité perd tout son sens.
La non-connaissance implique la non-recherche. Or dans les termes que
l’on considère comme synonyme de « sceptique » ou
« pyrrhonien », on trouve l’expression « zététique »4.
Zététique provient du mot grec zététis,
la recherche. Le zététique est donc celui qui recherche constamment
la vérité et ne s’arrête jamais de chercher puisqu’il se
déprend de toute conclusion dogmatique. Est-ce que Pyrrhon peut dès
lors être considéré comme un zététique, puisqu’Aristoclès
nous dit qu’il ne poursuit plus l’examen de quelque chose que ce
soit. Sextus Empiricus prétend que oui et accuse les tenants de
la Nouvelle Académie sceptique qu’étaient Arcesilas et Carnéade
de ne pas être de véritables zététiques (et de ne pas être de
véritables sceptiques au demeurant) :
« Les
uns disent qu’ils ont trouvé la Vérité ; les autres disent
qu’elle est incompréhensible ; et les autres continuent à la
chercher. On appelle dogmatiques ceux qui s’imaginent l’avoir
trouvée ; tels sont Aristote, Epicure, les Stoïciens, et
quelques autres. Ceux qui ont dit qu’elle est incompréhensible,
sont par exemple, Clitomaque, Carnéade et les autres Académiciens.
Et ceux qui la cherchent toujours, ce sont les Sceptiques. On doit
donc distinguer trois manières générales de philosopher :
celle des Dogmatiques, celle des Académiciens et celle des
Sceptiques5 ».
Sextus Empiricus considère donc qu’il y a d’un côté, les vrais
sceptiques, c’est-à-dire les pyrrhoniens, et de l’autre, les
faux sceptiques, les Académiciens comme Arcésilas ou Carnéade,
héritiers de l’Académie de Platon, et donc héritiers aussi de la
figure de Socrate. Les vrais sceptiques qui se revendiquent du
fondateur Pyrrhon cherchent encore la vérité. Les Académiciens
auraient abandonné cette recherche, parce qu’ils postulent que la
science est complètement hors de portée de l’homme.
Peut-être
Sextus avait-il en tête les formules respectives de Socrate et de
Métrodore de Chios. Métrodore fut disciple de Démocrite et le
maître de Diogène de Smyrne, qui lui-même fut le maître
d’Anaxarque d’Abdère qu’accompagna Pyrrhon sur les chemins de
l’Asie mineure et de l’Inde. Socrate disait : « je
sais que je ne sais rien » ; Métrodore de Chios disait :
« Je ne sais rien, et je ne sais même pas cela que je ne sais
rien6 ».
Pour Métrodore, le fait de ne pas savoir n’est même pas un objet
de connaissance certain. Il faut donc encore chercher pour savoir si
l’on sait ou si l’on ne sait pas ! La formule de Socrate
comparée à l’autre semble ainsi plus catégorique, postulant le
non-savoir comme un fait acquis et irrémédiable.
On
sent donc clairement l’envie de Sextus Empiricus de se démarquer
des Académiciens. Cela semble néanmoins étrange parce que Socrate,
dans les œuvres de Platon, inspecte tout, cherche des définitions
pour déterrer la moindre petite aporie qui viendra mettre en péril
le raisonnement de son interlocuteur. Or Socrate n’abandonne jamais
la recherche ; au contraire, il évoque toujours la possibilité
d’une science qui viendrait solutionner toutes les problématiques,
même si cette science se cache derrière un grand nombre d’apories
et des paradoxes qu’on ne pourra lever qu’après un temps très
long de recherche.
Pour Arcésilas et Carnéade, Platon est bien
évidemment un philosophe sceptique, puisque dans ses œuvres, il ne
fait que confronter les avis et les conceptions des différents
interlocuteurs sans jamais donner sa propre conviction. On n’arrive
jamais à une certitude parfaite, mais l’important est ce processus
de recherche et de confrontation des idées, ce que Platon appelait
la « dialectique ascendante ». En tant qu’héritiers de
Socrate et Platon, il est étonnant que ceux-ci aient à ce point
renié la quête de la science, surtout que l’Académie a toujours
été un centre de recherche dans toutes sortes de domaine. « Sur
ce point, la Nouvelle académie reste entièrement fidèle à l’idée
platonicienne d’une quête de l’être. Certes on désespère
d’atteindre le vrai et l’être (que l’on entend d’ailleurs à
la façon stoïcienne), mais on garde le mouvement lui-même comme
mouvement d’approche. L’esprit de la Nouvelle Académie est celui
d’une recherche empirique par recoupement des observateurs,
concordance des témoignages, etc.7 »
Il
faut certainement voir chez Sextus Empiricus une intention polémique
de se démarquer par rapport à la Nouvelle Académie. Aulu-Gelle
expliquait que : « C’est
une question ancienne fort controversée parmi les écrivains grecs
que celle de savoir s’il y a une différence entre la Nouvelle
académie et le pyrrhonisme8 ».
Il faut peut-être aussi y voir le signe d’un agacement de Sextus
face aux nouveaux Académiciens qui n’étaient pas vraiment clairs
quant à leur doctrine. Étaient-ils des dogmatiques semblablement à
l’image dominante que l’on s’est forgé de Platon ? Étaient-ils des sceptiques ? Étaient-ils des dogmatiques du
scepticisme comme le prétend Sextus, qui affirmaient catégoriquement
qu’aucune connaissance n’était possible ?
En fait, les
Académiciens n’étaient pas trop pressés de trancher. En fait,
différentes conceptions de ce que devait être le platonisme et
l’Académie circulaient au sein de cette institution, chacun étant
libre de se forger son opinion, même si des courants dominants se
dessinaient selon les époques. Et on voit fréquemment un
Académicien évoluer dans ses propres opinions au cours de sa vie :
ainsi, Antiochus d’Ascalon aurait commencé sa carrière comme un
sceptique dans la lignée d’Arcésilas et de Carnéade pour évoluer
vers un dogmatisme assez marqué par le stoïcisme. Il a d’ailleurs
dressé un réquisitoire contre Carnéade et Philon de Larisse,
refusant d’identifier l’ancienne Académie de Platon et la
nouvelle Académie sceptique9.
La question même de savoir si Platon lui-même était sceptique fort
sujette à caution pendant l’Antiquité, y compris au sein de
l’Académie10.
Ainsi, le scepticisme des Académiciens pouvait à l’époque de
Sextus Empiricus sembler particulièrement mouvant et fluctuant, ce
qui pouvait provoquer un agacement certain dans le camp des
pyrrhoniens qui ne savaient pas à quoi s’en tenir avec eux.
Par
ailleurs, Arcésilas et Carnéade se sont opposés frontalement aux
stoïciens, essayant par tous les moyens d’attaquer et de réfuter
le critérium de vérité qu’est la représentation compréhensive
(phantasia
cataléptiké).
Aucun critère n’est vrai puisqu’on peut toujours trouver une
représentation fausse semblable à n’importe quelle représentation
vraie11.
Comme l’explique Victor Brochard : « La
définition stoïcienne admet explicitement qu’une représentation
vraie diffère spécifiquement des autres représentations, comme les
serpents à corne diffèrent des autres représentations. Les
premières sont produites par ce qui est, de telle façon qu’elles
ne sauraient être produites semblablement par ce qui n’est pas.
Or, en fait, disait Arcésilas, cette différence spécifique
n’existe pas, car des objets qui ne sont pas font sur nous des
impressions aussi nettes et aussi expresses que ceux qui sont. Nous
n’avons aucun moyen, lorsqu’une représentation se produit, de
distinguer si elle est compréhensive ou non, si elle a un objet ou
n’est qu’un fantôme. Il n’y a donc pas de critérium de la
vérité12 ».
Quand un homme voit des fantômes et d’autres formes terrifiantes,
cela lui fait aussi peur que s’il était tombé sur un ours sauvage
affamé, bien réel et bien en chair. Arcésilas refuse aux stoïciens
qu’un critère puisse jamais fonder ce qui est réel et donc
connaissable (la représentation compréhensive en l’occurrence
chez les stoïciens) et ce qui est irréel et provient d’une
déformation des sens, d’une illusion optique ou encore d’une
hallucination. Cette façon radicale de s’opposer aux stoïciens a
peut-être donné l’impression à Sextus qu’Arcésilas et les
Académiciens en général refusaient totalement toute saisie de la
vérité. Mais cette conception d’Arcésilas ne peut se comprendre
qu’à partir des incessantes controverses que celui-ci a tenu avec
les stoïciens. Il tente de réfuter un argument dogmatique, et pour
cela, utilise toutes les ficelles de la dialectique.
La
démarcation de Sextus Empiricus est donc celle-ci : d’un
côté, Pyrrhon, Sextus, Aenésidème et les pyrrhoniens qui sont des
zététiques, de l’autre, Arcésilas, Carnéade, Clitomaque et les
autres Académiciens qui ne sont pas zététiques. Marcel Conche
refuse ce point de vue. Selon Conche, Pyrrhon n’est pas un
zététique, il a abandonné l’idée de la recherche et de vouloir
trouver à tout prix une quelconque vérité. Marcel Conche prend
donc fait et cause pour le compte-rendu que fait Aristoclès quand
celui-ci dit que le sceptique n’a plus à poursuivre l’examen des
objets de la connaissance: « Ce
qui est, en tout cas, certain, est que le terme « zététique »
ne saurait convenir à Pyrrhon ; il a dû lui être attribué,
rétrospectivement, par des sceptiques tardifs, soucieux de se
distinguer des néo-académiciens et d’authentifier leur
scepticisme en se rattachant au fondateur. Ce dont Timon fait gloire
à Pyrrhon, c’est la non-recherche : « Ce n’est pas
toi qui t’es soucié de chercher quel air entoure la Grèce, d’où
viennent les choses et à quoi elles arrivent » 13»
La ligne de démarcation change donc de profil si l’on en croit
Marcel Conche : il y a d’un côté Pyrrhon et ses disciples
proches dont Timon de Phlionte, et de l’autre les pyrrhoniens
tardifs dont Sextus Empiricus est le représentant le plus connu, qui
sont mis dans le même sac que les nouveaux Académiciens.
Je
mettrais pour ma part un bémol par rapport à ce qu’avance Marcel
Conche. Si la coupure me semble juste, Pyrrhon d’un côté, Sextus
et Arcésilas de l’autre, je serais néanmoins réticent à refuser
le titre de « zététique » à notre philosophe d’Elis.
Pyrrhon est, à mes yeux, quelqu’un qui cherche et qui teste la
nature des apparences, même si ces apparences sont plus celles de la
vie que des apparences naturelles qu’on étudierait avec un œil
scientifique. J’ai déjà dit plus haut que Pyrrhon comme
Socrate se détournaient des observations sur la nature et la science
propre à la « physique » de l’Antiquité pour se
tourner vers des préoccupations plus morales et existentielles.
Pyrrhon cherche donc mais sans la tension du chercheur tout crispé
sur la volonté de découvrir ce qui est caché et inaccessible pour
l’instant. Pyrrhon cherche la sagesse et la vérité ; oui,
mais il ne se tracasse pas s’il ne trouve pas. Pyrrhon interroge
constamment l’existence, mais ne se plaint pas du tout s’il ne
reçoit pas de réponse. Après tout, le silence est lui-même très
satisfaisant pour qui aime la quiétude et l’aphasie. Pyrrhon est
donc un chercheur pour qui il est indifférent de trouver ou de ne
pas trouver. En ce sens, la recherche de Pyrrhon est bien une
non-recherche, puisqu’elle est complètement détachée de l’objet
à trouver. Pyrrhon avait parfois la manie de partir sur les routes,
on ne sait où, lui-même ne savait pas ; et il allait comme ça,
nonchalant, sans motif, ni raison, au hasard des rencontres14.
Pareillement, la recherche de Pyrrhon est comme une flânerie dans
l’existence. C’est une recherche sans but, ni profit,
complètement gratuite, tout à fait libre de ce qui est à
rechercher. Peut-on encore appeler cela une recherche ? Je vous
en laisse juge.
Mais
revenons-en au texte d’Aristoclès : « Il
vrai que (Pyrrhon) n’a laissé aucun écrit, mais Timon, son
disciple, dit que celui qui veut être heureux a trois points à
considérer… ».
Pyrrhon s’inscrit donc clairement dans une forme d’eudémonisme,
une doctrine tendant au bonheur comme le seront plus tard aussi
l’épicurisme et le stoïcisme. Il y a là peut-être une influence
d’Anaxarque d’Abdère qui appelait son école « eudémonique ».
On le surnommait d’ailleurs le Bienheureux du fait de son humeur
toujours souriante et de sa capacité impressionnante à ramener les
gens dans la modération et le contentement. Il reste donc à prendre
en considération ces trois points dont nous parle Aristoclès.
1
Louis ROBIN,
« Pyrrhon
et le scepticisme grec »,
p. 12 cité par Marcel Conche dans « Pyrrhon
ou l’apparence »,
op. cit., chap. IV, p. 55.
2
Marcel Conche, op. cit.,
pp 57-58. Jean-Paul Dumont, « Le
scepticisme et le phénomène »,
Vrin, Paris, 1985, livre II, chap. II, pp. 135-142.
3
Eusèbe de
Césarée, « Préparation
évangélique »,
XIX, 18, 1-4, cité dans Marcel Conche, op.
cit.,
chap. IV, pp. 59-61. J’ajoute les paragraphes et la numérotation
pour clarifier l’exposé et mettre en évidence sa structure
interne. Les tirets dans les mots indifférents, immesurables et
indécidables sont là pour bien insister sur la négation qui se
trouve dans ces adjectifs.
4
Diogène
Laërce, op.
cit.,
IX, 69-70. Diogène mentionne aussi les noms d’« éphectique »
(c’est-à-dire celui qui pratique l’épochè,
la suspension du jugement) et d’« aporétique » (celui
qui conduit à des apories, des conclusions douteuses et
ambivalentes).
5
Sextus
Empiricus, « Hypotyposes
pyrrhoniennes »,
I, 2-3, cité dans Marcel Conche, « Pyrrhon ou l’apparence »,
op. cit., chap. VII, p. 86, note 2..
6
Diogène Laërce, op. cit.,
IX, 58.
7
Marcel Conche, op. cit.,
chap XIV/2, p. 241.
8
Aulu-Gelle, « Nocturnes Attiques », XI, 5, cité dans
Victor Brochard, « Les
sceptiques grecs »,
op. cit., livre II, Chap. III, p. 108.
9
Victor Brochard, “Les
sceptiques grecs”, op.
cit., livre II, chap. VI, pp 220-336. C’est donc à Antiochus que
l’on doit l’expression de « Nouvelle Académie ».
Arcésilas et Carnéade devaient parler tout simplement de
l’Académie, se voyant eux-mêmes comme de simples continuateurs
et héritiers de l’œuvre de Platon.
10
Diogène
Laërce, op.
cit.,
III, 51.
11
Victor
Brochard, op.
cit.,
livre II, chap. II/III, pp. 118-122.
12
Victor
Brochard, ibid.,
pp. 120-121.
13
Marcel
Conche, « Pyrrhon
ou l’apparence »,
op. cit., chap. VII, p. 87. La citation de Timon se trouve dans :
Diogène Laërce, op.
cit.,
IX, 65.
14
Diogène
Laërce, op.
cit.,
IX, 63.
Aryballe corinthienneen forme de chouette. Ve siècle. Musée du Louvre. |
Voir toutes les parties d'un Nomade de la Raison voir le sommaire.
Concernant Pyrrhon, voir également :
Voir également :
- Rien de certain (Pline l'Ancien chez Montaigne)
- La vie est un songe un peu moins inconstant (Blaise Pascal)
Bibliothèque d’Éphèse (Anatolie, actuelle Turquie) |
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