Je
viens de regarder l'émission spéciale conjointe d'Envoyé
Spécial et de Complément d'Enquête :
« Coronavirus : état d'urgence » (2 avril
2020). Il y a beaucoup de choses qui m'ont choqué dedans : la
pénurie de masque depuis plusieurs années et les travailleurs qui
travaillent sans masque et sans protection, la lenteur dans la
réaction à la crise, l'absence programmée de tests alors que des
laboratoires vétérinaires habitués aux tests de masse avaient
proposé de les accomplir et qui ont refusé par l'administration
pour des questions purement administratives, le maintien des
élections municipales, etc... Mais je voudrais réagir à un point
en particulier, c'est l'interview du médecin Rémi Salomon, haut
responsable des hôpitaux de Paris, après une heure d'émission.
Celui-ci dans la droite ligne des autorités sanitaires et politiques
européennes et américaines continue à minimiser l'importance des
masques.
Rémi
Salomon affirme : « Quand vous marchez dans la rue et
que vous respectez la distance, vous ne courez pas de risque. Le
risque de contamination se fait par les gouttelettes. C'est quand
vous parlez, un mètre ou deux mètres de distance. Sinon il n'y a
pas de risques. Et ce qu'on n'a pas dit assez, c'est l'autre danger
quand vous sortez de chez vous, ce n'est pas tant de croiser
quelqu'un qui est risqué, parce qu'en général comme je viens de le
dire, on prend ses distances, mais c'est plutôt tout ce que l'on
touche. Le virus est très résistant dans le milieu extérieur ».
Le
journaliste lui demande alors : « Un grand nombre de
personnes travaillent sans porter de masque. Est-ce que là il ne
faut pas recommander de porter des masques ? Cela paraît
évident ». Ce à quoi le médecin répond : « Alors,
aux endroits où les gens sont proches par nécessité, là il faut
effectivement avoir un masque, la caissière au supermarché exposée
toute la journée à des personnes qui sont proches d'elles doit
porter, mais le tout un chacun qui sort dans la rue n'a pas besoin de
porter de masque s'il tient ses distances, y compris quand il fait
ses courses. Et je permets d'insister sur les gestes barrières qui
n'ont pas été suffisamment expliqués (sic!).
« Ce
qui est dangereux quand vous sortez de chez vous : c'est le
bouton d'ascenseur, la poignée de la porte. Au supermarché, c'est
l'écran de la caisse que vous touchez ou le code numérique que vous
devez taper pour la carte de crédit, car tout objet qui est touché
par quelqu'un d'autre est susceptible de porter du virus. Et ensuite,
vous mettez sans y penser la main au visage, et vous vous contaminez.
Dès que vous rentre vous, il faut laver les mains et laver au
détergent les surfaces qui ont pu être touchées. Ces mesures sont
plus essentielles que le masque ».
Plusieurs
remarques pour répondre à ces propos :
1°)
La distance de sécurité d'1,5 m est aujourd'hui remise en cause.
Rappelons pour faire simple que le virus n'a pas de petites pattes,
ni de petites ailes pour se déplacer d'un point a à un point b. Il
dépend de « véhicules » pour franchir cette distance.
En l'occurrence, les gouttelettes sont pour lui comme un « avion »
qui peut le conduire d'une personne à une autre par voie aérienne.
Quand on expire, on n'envoie pas ces gouttelettes au-delà de 1,5 m.
D'où la fameuse distance de sécurité que la police voudrait que
vous respectiez dans la rue. Mais si vous toussez, cette distance est
de 2 mètres. Si vous éternuez, cette distance peut aller jusqu'à 6
mètres. Donc, à moins de se promener sur les Champs Élysées,
croiser quelqu'un sur le trottoir n'est pas totalement sans risque
puisque si cette personne éternue quand vous passez à son niveau,
il risque de vous envoyer ses postillons. Ce qui veut dire que, même
en rue, les masques ne sont pas superflus !
Cough = toux, sneeze = éternuer, droplet = gouttelette. Source : Sui Huang, "Why we should all wear masks - there is a new scientific rationale", Medium, 27 mars 2020. |
2°)
Rémi Salomon reconnaît quand même que le risque existe pour les
personnes qui travaillent dans des lieux clos comme les caissières
de supermarché et qu'il serait justifié qu'elles portent un masque.
Merci pour elles, monsieur le docteur ! Mais ce qui serait encore
mieux pour les caissières, c'est que les clients portent eux aussi
un masque pour garder pour eux leurs postillons et leurs gouttelettes
de salive qui ne retomberont sur ces employées des grande surfaces !
Cela protégerait nettement mieux ces caissières. C'est une simple
mesure, et je suis étonné que ce grand esprit des hôpitaux de
Paris n'y ait pas pensé !
Ajoutons
que, dans les endroits clos, la ventilation en circuit fermé est un
gros problème, car cela favorise dangereusement les risques de
contagion. Je reprends ici in
extenso les explications d'un
collectif de médecins et scientifiques belges 1
qui me semblent éclairantes : « "Les
espaces confinés favorisent la transmission par aérosol et peuvent
être le lieu d’épisodes de super-contagion, comme ce fut le cas
dans des rassemblements évangéliques en France (Mulhouse) et en
Corée du Sud (Daegu). En effet, le phénomène peut être exacerbé
par un système de chauffage aérotherme ou de la climatisation, où
l’air est remis en circulation à l’intérieur des locaux par
souci d’économie de chauffage (ou de froid). Il est donc
recommandé d’arrêter tout dispositif de ce type, qui contribue à
faire circuler l’air ambiant. Par contre, l’aération massive et
fréquente par l’air extérieur dans les locaux encore fréquentés
par le public, les pharmacies, la poste, les petits magasins
d’alimentation et les supermarchés, contribue par dilution à une
réduction du nombre de particules infectieuses auxquelles le public
est exposé.
Les systèmes de chauffage aérotherme de nombreux bâtiments comprennent bien évidemment une admission d’air frais pour maintenir la qualité de l’air intérieur, mais ils n’ont été prévus que pour des polluants ordinaires et maintenir un taux d’humidité acceptable. Encore beaucoup plus grave, des systèmes aérothermes autonomes, essentiellement constitués d'un simple échangeur de chaleur muni d'un ventilateur, sont largement utilisés pour le chauffage d’ateliers, garages, magasins alimentaires, etc. Leurs utilisateurs (artisans, petits industriels, commerçants etc.) doivent prendre conscience du danger qu’ils présentent et de la nécessité d’une mise à l’arrêt immédiate ».
3°) Rémi Salomon explique aussi le danger de toucher des surfaces qui aurait été contaminées par les mains d'un malade comme une poignée de porte, les touches du clavier pour le corde de votre carte de banque, et ainsi de suite... C'est effectivement un danger, et il convient d'y prendre garde. Il a raison de recommander de se laver les mains souvent. Mais bon sang de bon dieu, pourquoi alors ne pas conseiller le port de gants ? C'est le meilleur moyen que vos doigts ne soient pas en contact direct avec la surface contaminée. Cela ne résout pas le problème du fait de toucher votre visage, même si avec des gants en caoutchouc, vous aurez moins envie de toucher votre visage pour vous gratter. Mais rien ne vous empêche de vous laver les mains AVEC vos gants. C'est ce que je fais quand je me rends quelque part. A la moindre occasion, je vais me laver les mains avec mes gants. Et quand je rentre chez moi, je commence par me laver les mains et les poignets avec mes gants. Une fois les gants bien nettoyés, j'enlève les gants. Puis je me lave les mains nues. Il me semble que c'est le degré de vigilance qu'il faut avoir.
En
conclusion, portons des masques ! Portons des gants ! Si
vous n'avez pas de masques chirurgicaux, portez un masque en tissu !
Si vous n'avez pas de masque en tissu, portez un foulard ou une
écharpe ! Que les citoyens se mobilisent pour fabriquer des
masques en tissu ! Que l’État se réveille et lance la
fabrication de masques à vaste échelle. Si la fabrication de
masques chirurgicaux n'est pas possible dans l'immédiat, mobilisez
l'industrie textile pour qu'elle fabrique des masques en tissus à
grande échelle. Vite ! Il y a urgence. Il y a des morts tous
les jours ! Ce n'est plus le temps d'attendre.
Frédéric Leblanc,
le 5 avril 2020.
1
« L’OMS
continue dans sa recommandation absurde de dire que les masques ne
sont pas nécessaires pour le grand public »,
tribune d'un collectif
belge de scientifiques et médecins, dont Marc Wathelet,
virologiste, spécialiste des coronavirus
dans la Libre Belgique, 3 avril 2020.
Liens
utiles
(J'étoffe
cette rubrique au fur et à mesure.
N'hésitez
pas à me renseigner en commentaire
pour
les études et informations intéressantes et pertinentes)
Mes
articles où j'argumente plus en détail en faveur du masque
chirurgical :
-
Restez
chez vous ! Mais si vous sortez, sortez masqué !
- Masques : les conséquences d'une fake news
- Masques : les conséquences d'une fake news
Sur
l'efficacité des masques :
« Coronavirus :
les masques maison sont-ils efficaces ? »,
La Nutrition, le 17 mars 2020.
Camille
Rivieccio, « Coronavirus.
Masque chirurgical, protection en tissu… Est-ce efficace
contre
le Covid-19 ? »,
Ouest-France, le 19 mars 2020.
Docteur
Pierre Jacques Raybaud, Coronavirus :
je vous implore
(lettre au président de la République), le 15 mars 2020.
Docteur
Pierre Jacques Raybaud, Coronavirus :
recommandation et inhalation,
le 2 mars 2020.
Une
interview où le docteur
Pierre Jacques Raybaud explique sa position en faveur du port du
masque :
« Ne
pas porter de masque pour se protéger du coronavirus est une
« grande erreur », affirme un scientifique chinois haut
placé »,
interview réalisée par Jon Cohen, Le Monde, 31 mars 2020.
« Pourquoi
nous devrions tous porter des masques : il y a de nouvelles raisons
scientifiques » du biologiste Sui Huang (en anglais), 27
mars 2020.
« L’OMS
continue dans sa recommandation absurde de dire que les masques ne
sont pas nécessaires pour le grand public »,
tribune d'un collectif
belge de scientifiques et médecins, dont Marc Wathelet,
virologiste, spécialiste des coronavirus
dans la Libre Belgique, 3 avril 2020.
« Masques :
mais de qui se moque-t-on ? », tribune de Serge Galam
dans Libération du 2' mars 2020.
« Pandémie
de Covid-19 : mesures barrières renforcées pendant le
confinementet en phase de sortie de confinement »,
communiqué de Académie nationale de Médecine (France) du 2 avril
2020 qui appelle au port obligatoire du masque pour l'ensemble de la
population.
-
Professeur Nathan Clumeck : « Je
souhaite le port généralisé du masque, arrêtons de prendre la
population pour des enfants », RTBF, 4 avril 2020.
Des
études scientifiques sur l'efficacité des masques chirurgicaux et
des masques en tissus artisanaux :
- Testing
the Efficacy of Homemade Masks: Would They Protect in an Influenza
Pandemic?
- Professional and Home-Made Face Masks Reduce Exposure to Respiratory Infections among the General Population
- Professional and Home-Made Face Masks Reduce Exposure to Respiratory Infections among the General Population
- The
Lancet : « Rational
use of facial use in the covid-19-pandemic »,
- Un
site qui regroupe les articles scientifiques sur la question des
masques :
- « Respitory virus shedding in exhaled breath and efficacy of face masks », Nature, 3 avril 2020.
Sur
le fait de mentir délibérément à la population sur la prétendue
« inutilité » des masques :
- Zeynep Tufepki, « Why
Telling People They Don’t Need Masks Backfired »
(Pourquoi dire aux gens qu'ils n'ont pas pas besoin de masque a
provoqué un retour de flamme ), New York Times, 17 mars 2020.
Sur
les différences culturelles concernant le port du masque :
-
Dorothée Duchemin, « Grippe :
pourquoi personne ou presque ne porte de masque en France »,
Slate, janvier 2019.
-
Bruce Pedroletti, Le
dénigrement du masque suscite la consternation en Asie, Le
Monde, 21 mars 2020.
Florence
de Changy, « Depuis
Hong Kong: "Je suis ahurie d'entendre les autorités continuer
d'affirmer que le masque ne sert à presque rien », La
Libre Belgique, le 22 mars 2020.
Sur
le scandale honteux de la pénurie de masques en France
-
Fabien Magnenou, « Coronavirus :
pourquoi la France manque-t-elle de masque respiratoire ? »,
France Info, 19 mars 2020.
-
Les Crises : « Le
gouvernement français a liquidé les stocks de masque ffp2 »
-
Le Courrier International : « La
pénurie de masque en France symbolise le délabrement du système de
santé »
-
Mediapart : « Masques :
les preuves d'un mensonge d'Etat », 3 avril 2020.
Ce
n'est pas mieux en Belgique :
-
« Coronavirus :
les 5 millions de masques reçus ne conviennent pas aux besoins de
première ligne », Le Soir, 22 mars 2020.
Coudre
un masque est un acte citoyen
Patron
pour masque de soin en tissu (par le CHU de Grenoble)
Marie
Rimet : « Tuto
pour un masque de soin à partir du patron du CHU de Grenoble ».
Cécile
DIY : « Masque
de soin selon le patron du CHU de Grenoble ».
Coutures
et paillettes : « La
place des masques en tissu dans la prévention du coronavirus
covid-19 »
Madalena
Couture : « Coudre
un masque de protection avec ouverture »
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